la terre

de Benjamin de la Fuente, Samuel Sighicelli, Benjamin Dupé (2008)

Ciné concert, sur le film d’Alexandre Dovjenko – 1h15

DESCRIPTIF

 

LE CHOIX D’UN FILM

En 1929, la mort du doyen d’un village agricole ukrainien annonce une nouvelle ère pour les paysans. Le problème de la collectivisation des terres divise les habitants du village. Les riches koulaks combattent l’application des idées révolutionnaires. Le jeune communiste Vassili met tout son enthousiasme dans la mise en œuvre des réformes agraires, et fait venir les premières machines agricoles au village. Au cours d’une douce nuit d’été, au comble du succès de ses entreprises, Vassili danse de joie, seul au clair de lune. Khoma, le koulak, le tue par surprise. Le paysan devient alors un martyr de la cause paysanne. Alors que l’assassin s’enfuit, le village se dresse pour célébrer les obsèques de son héros et prépare une lutte pour la collectivisation. On chante des chants sur «la vie nouvelle». On en renie même le pope. Khoma reste seul, dévoré par sa fureur stérile, de même que le pope, qui implore Dieu de «punir les impies». La nature continuera à protéger la terre féconde et la paix des paysans unis dans une œuvre de progrès.

Tourné en 1930, le film fut couronné à Bruxelles en 1958 comme l’un des douze meilleurs films du monde, par un jury composé de critiques du monde entier, en compagnie de La Ruée vers l’Or, du Cuirassé Potemkine et de La Mère.

ABORDER LA TERRE EN MUSICIENS

La première chose qui vient à l’esprit, si l’on considère le «souffle» dramaturgique et les grandes lignes visuelles du film, c’est ce «chant de la terre», immense hymne au-delà de toute idéologie, qui s’en dégage peu à peu, implacablement. La nature s’inscrit dans le tempo du film. Sans cesse Dovjenko nous redonne le la avec des images d’espace vide, de ciels nuageux, de grands champs sauvages ou cultivés, de perspectives de routes désertes où souffle le vent. Le film s’ouvre d’ailleurs sur une longue scène étrange où le vieillard «se meurt» parmi les siens, lentement, simplement et sans résistance. Cette scène annonce un éternel recommencement (à la fin un enfant naît, la récolte approche). Ces espaces et ce temps cyclique inspirent une dimension «indienne» de la musique, c’est à dire un renoncement au discours dramatique, au profit d’un discours de la variation, de l’imprégnation, voire de la périodicité. Cette dimension musicale n’est pas la seule mais elle apparaît à plusieurs reprises, comme une nécessité.

Il y a aussi une attente, une suspension qui habite une bonne partie du film: on attend le tracteur, on attend des jours meilleurs, on attend la récolte, on attend la mort et la naissance. Cette suspension est a son comble – et devient même un suspens – au moment où le tracteur tombe en panne sur le chemin des champs et que l’angoisse envahit le cœur des villageois impuissants. L’occasion de rappeler que la machine, symbole du renouveau et du communisme ne pouvait et ne devait pas avoir de faille. L’occasion pour nous de créer du vertige musical, de glisser aux confins du son, là où l’oreille doute.

Il y a enfin le mouvement, les mouvements, de foules, de machines, de joie, de révoltes, mouvements qui emballent le rythme visuel, hachent le temps, multiplient les points de vue et imbriquent des actions simultanées. Mouvements qui souvent emportent la musique avec eux tant leur nécessité semble venir de loin: le rythme musical et ses accents deviennent alors comme une amplification des cœur palpitants des femmes et des hommes du film… ou bien le son du vent qui assourdit.

DISTRIBUTION

Film d’Alexandre Dovjenko
Création musicale : Sighicelli, de la Fuente, Dupé
Maître d’œuvre du projet : Samuel Sighicelli

Benjamin de La Fuenteviolons électrique et acoustique
Benjamin Dupéguitare électrique
Samuel Sighicelliorgue Hammond et sampler

Une co-commande de l’Auditorium du Musée du Louvre et du Printemps des Arts de Monte-Carlo